Mal-logés, sans toit ni loi


Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de Droit au logement (DAL).

«Sans doute pour entamer la détermination des familles du campement de la rue de la Banque, qui ont repris leur action depuis le 14 décembre, la marche de dimanche s’est terminée sous les matraques des gendarmes mobiles, et avec six blessées parmi les manifestants. Il s’agissait, pour le troisième dimanche consécutif, d’obtenir un rendez-vous à Matignon, afin d’organiser le relogement des familles du campement de la rue de la Banque. Le ministère du Logement n’a pas tenu les engagements pris il y a un an à la demande de l’Elysée : reloger les 374 familles avant la fin 2008. Le ministère en a logé 71, et de mois en mois, les propositions se raréfient.»

«Des moyens de relogement exceptionnels s’imposent, pour ces familles et les milliers de ménages déclarés prioritaires de par la procédure Dalo (loi sur le Droit au logement opposable, ndlr). Il est possible de convaincre les banques et compagnies d’assurance de mettre une partie de leur patrimoine à disposition, en contrepartie de l’aide étatique puisée essentiellement sur l’épargne populaire, qui sert à financer les logements sociaux. Il est possible de réquisitionner, comme l’avait fait Jacques Chirac en 1995, après l’occupation de la rue du Dragon par le DAL.»

«Dimanche, partie du gymnase Saint-Merri près de l’Hôtel de Ville, la marche qui rassemble plusieurs centaines de personnes, rejoint le pont des Arts par la rue du Louvre et s’arrête à son extrémité, côté rive gauche : la marche est alors stoppée par un barrage de gardes mobiles. Une banderole est accrochée sur le parapet : “Un toit, un droit !” La marche est essentiellement composée de mères de famille, avec leurs bébés et enfants en bas âge. Elles mènent une vie difficile, avec des emplois pénibles. Des mères souvent seules, qui luttent contre la misère pour élever leurs enfants dans des conditions correctes.»

«La police tente d’encercler les manifestants pour, selon ses termes, “les encager” sur un coin de trottoir. Mais la manœuvre aboutit à couper la manifestation en deux, à isoler un cordon de gardes mobiles au milieu des manifestantes. Alors commence la bousculade, les gardes mobiles lourdement équipés de boucliers, bottes, jambières et de matraques s’en prennent à ces femmes qui cherchent à rester ensemble. Sabrina traverse le barrage, un gendarme la poursuit et l’attrape par le cou, elle tombe et le gendarme déséquilibré lui tombe lourdement dessus : elle est assommée, évacuée en brancard et se réveille à Cochin. Plusieurs côtes cassées. Deux autres mères de famille sont également blessées aux jambes par des coups de matraques, et laissées sur le sol glacé pendant une heure et demie avant d’être évacuées par les pompiers.»

«Moi-même j’ai été blessé à la main par des coups de matraque. Fracture diagnostiquée le lendemain. Depuis, des plaintes ont été déposées à l’Inspection générale des services (IGS), la police des polices. La montée de la violence policière contre ces femmes en lutte pour vivre dignement et ne pas plonger dans la misère traduit l’état d’esprit du gouvernement, incapable de prendre des mesures concrètes pour tenir ses promesses et répondre à ses obligations légales.»

«Les mères du campement de la rue de la Banque continuent leur lutte : ce dimanche, elles marcheront, à partir de 15 heures, de la porte d’Ivry jusqu’à Matignon.»
-* Source : Libération.fr

Vidéo : Les familles en lutte de Droit au Logement manifeste en direction de Matignon pour demander un rendez vous avec le premier ministre. Depuis le 14 décembre, 200 familles non relogées de la lutte de la rue de la Banque ainsi que des familles reconnues prioritaires par les commissions DALO luttent pour un logement décent. La manifestation atteint le Pont des Arts où la police tend un guette-apens. Lorsque les manifestants font demi-tour, ils sont frappés et violentés par les garde-mobiles.