communiqué – ALERTE : amendement anti-squat menace les occupants sans titre


 

Paris le 15 septembre 2020 (mise à jour le 17 septembre)

MISE A JOUR DU 17 SEPTEMBRE:  L’amendement anti squat soutenu par le Gouvernement ( ministère du logement)  généralisant l’expulsion administrative (sur décision du préfet et sans jugement) des occupants sans titre a été adopté en commissions des lois de l’Assemblée Nationale mercredi 16 septembre. Cette proposition est excessivement dangereuse, et les délais sont courts puisque la loi dans laquelle sera insérée l’amendement sera discutée à l’Assemblée Nationale la semaine du 28 septembre.

 

 

Un amendement discuté cet après-midi en commission élargit l’expulsion sans jugement

à l’ensemble des occupants sans titre !

 

La proposition d’amendement n°695 du projet de loi ASAP, inséré après l’article 30 bis, du rapporteur Mr Guillaume KASBARIAN, député LREM et soutenu par le Gouvernement, étend l’expulsion administrative (expulsion forcée sur décision du préfet et sans jugement), en quelques jours et rétroactivement à tous les occupants sans titre de logements, bureaux, locaux et terrains vacants.

 

Le DAL ne soutient pas l’occupation de résidence secondaire ou du domicile d’autrui, c’est-à-dire de logements meublés, abonnés à l’énergie, l’eau, habités régulièrement et constate que la loi qui prévoit déjà d’expulser sans jugement dans ces situations n’est pas appliquée par les Préfets.

 

Or, l’amendement introduit le terme de « résidence occasionnelle », absent de la loi française[1] Il est également absent de la norme fiscale, pour laquelle une résidence principale est soumise à la taxe d’habitation, une résidence secondaire est soumise à la TH résidence secondaire et un logement vacant est soumis à une taxe sur les logements vacants dans certains cas.

 

Puisqu’il n’est ni une résidence principale, ni une résidence secondaire, « une résidence occasionnelle » est donc un logement vacant, une ruine, un terrain, ou tout espace sur, ou dans lequel un propriétaire s’y est établi quelques heures, ou quelques nuits, à un moment donné pour pique-niquer, y dormir lui ou une autre personne.

Il pourrait donc s’agir d’un local d’activité, du jardin d’une ruine, ou d’un terrain sur lequel a été planté une tente à un moment donné : il suffirait d’exposer lors du dépôt de plainte qu’il s’agit d’une résidence occasionnelle

 

Une autre dérive grave de cet amendement, si cette notion floue est maintenue, serait de donner un moyen, aux marchands de sommeil et autres bailleurs indélicats qui louent « au noir », d’expulser leur locataires bien qu’à jour de son loyer, pratiques courantes sur des pavillons de banlieue loués à la découpe, des chambres de bonne Haussmanniennes ou des taudis.

Sans bail, sans quittance, sans facture de fluide (énergie, eau …), le locataire surexploité serait alors à la merci d’une expulsion express et ce, sans examen du juge, pour peu que le locataire par exemple dénonce sa situation au service de l’hygiène ou au fisc. Une expulsion illégale déguisée en expulsion légale, en quelque sorte …

 

Par ailleurs, il arrive fréquemment que des occupants aient été escroqués par de faux propriétaires, qui profitent de la crise du logement et du nombre élevé de logements vacants. Ils sont donc de bonne foi.

Par extension, un « résidence occasionnelle » pourrait aussi être un terrain nu, ou être un local d’activité ou des bureaux vacants servant « occasionnellement » à y dormir une nuit ou deux …

 

Une telle mesure ouvrirait donc non seulement la voie à l’expulsion expéditive d’occupants sans titre qui occupent par nécessité un espace vacant, logement, local, bureaux ou terrain, mais aussi des familles locataires de bonne foi escroquées ainsi que des locataires non déclarés.

Enfin, cet amendement s’appliquerait rétroactivement aux personnes installées depuis plusieurs mois – ou années si le propriétaire n’a pas fait diligence.

 

Cet amendement vient dans un contexte d’aggravation de la crise du logement et de dégradation des conditions de logement des « premiers de corvée ». Chaque année de tristes records sont battus : nombre de logements vacants, de jugements d’expulsion, de sans abris, de demandes HLM non satisfaites, de prioritaires DALO non relogés …

 

Là où il faudrait appliquer la loi de réquisition, mettre en place une stratégie nationale de mobilisation des logements vacants, il est choisi sous la pression de médias populistes et de quelques affaires montées en épingle, de mettre les personnes en grande précarité logement à la rue.

Elles ne sont pas ménagées depuis le 11 juillet, fin de la trêve hivernale des expulsions. Les occupants sans titre de locaux et de terrains vacants sont expulsés par milliers et laissés pour la plupart sur le trottoir, au mieux après quelques nuits d’hébergement.

 

Au plan moral, cette mesure accable durement les sans logis qui ne se résignent pas à mourir prématurément sur les trottoirs. Chaque année plusieurs centaines de sans abris décèdent du fait de leurs conditions de vie misérables et de la violation de leur droit primaire à un hébergement stable jusqu’à leur relogement, à l’âge moyen de 49 ans. La rue tue au bout de 15 ans en moyenne.

 

Si cette disposition brutale, que nous avons découverte mardi après midi, est adoptée en commission des lois à l’assemblée, il faudra nous mobiliser, car l’urgence est là.

En effet, il ne restera plus qu’un débat en séance à l’assemblée à partir du 27 septembre et une adoption définitive en Commission mixte paritaire pour changer le cours des choses.

 

Intention inavouée ou erreur d’appréciation du Gouvernement ? Il faut supprimer les mots « résidence occasionnelle » et conduire une politique du logement pour loger plutôt que réprimer.

[1] Le terme de « résidence occasionnelle » a été mis en place par l’INSEE dans les années 90 pour désigner les logements occupés par intermittence par leur propriétaire pour des raisons professionnelles (députés par exemple, pied à terre …). Mais une norme INSEE ne fait pas loi. L’introduction de cette norme dans le recensement avait eu pour effet de réduire temporairement le nombre de logements vacants …

 

 

 

 

Un toit c’est un droit !

[1] Le terme de « résidence occasionnelle » a été mis en place par l’INSEE dans les années 90 pour désigner les logements occupés par intermittence par leur propriétaire pour des raisons professionnelles (députés par exemple, pied à terre …). Mais une norme INSEE ne fait pas loi. L’introduction de cette norme dans le recensement avait eu pour effet de réduire temporairement le nombre de logements vacants …



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AMENDEMENT N°695 présenté par M. Kasbarian, rapporteur

amendement 

 ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L’ARTICLE 30 BIS, insérer l’article suivant:

L’article 38 de la loi n° 2007‑290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

 Après le mot : « autrui » sont insérés les mots : «y compris lorsqu’il s’agit d’une résidence secondaire ou occasionnelle » ;

2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La décision de mise en demeure est prise par le préfet dans un délai de quarante-huit heures à compter de la réception de la demande. En cas de refus, les motifs de la décision sont communiqués sans délai au demandeur. »

3° Le dernier alinéa est ainsi modifié :

Après le mot : « procéder », sont insérés les mots : « sans délai » ;

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le présent amendement vise à garantir la bonne application de l’article 38 de la loi n° 2007‑290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable. Il apparaît ainsi nécessaire d’améliorer l’effectivité de la procédure administrative d’expulsion de personnes occupant de façon illicite les logements occupés ou temporairement inoccupés, telles que les résidences secondaires.

Premièrement, afin de clarifier le champ d’application de l’article 38 et mettre fin aux ambiguïtés interprétatives relatives à la notion de « domicile », le présent amendement précise que le domicile correspond aussi bien aux résidences principales que secondaires ou occasionnelles, dans le but de rendre pleinement applicable la procédure d’expulsion aux personnes occupant de façon illicite ces résidences.

Deuxièmement, il introduit un délai d’instruction de 48 heures des demandes de mise en demeure des occupants présentées au préfet sur le fondement du premier alinéa de l’article 38. En cas de refus de donner suite aux demandes des propriétaires ou locataires lésés par le squat de le leur logement, les services administratifs devront leur communiquer sans délai les motifs de la décision de refus.

Troisièmement, dans un même objectif de célérité procédurale, cet amendement précise que le préfet saisi d’une demande d’évacuation forcée du local devra intervenir « sans délai », ce qui permettra de renforcer concrètement le caractère opérationnel du dispositif.

Cette évolution facilitera la protection du droit de propriété, en simplifiant et en accélérant les dispositions déjà existantes afin de lutter efficacement contre les squats de logements, qu’il s’agisse d’une résidence principale, secondaire ou occasionnelle.