TOULOUSE : EXPULSION DU DAL 31, DU CENTRE SOLIDAIRE ABBÉ PIERRE ET DE SES HABITANT-E-S DE LA GRAVE


Communiqué du DAL Toulouse, le 21 avril 2021

 

Expulsion du DAL 31, du Centre Solidaire Abbé Pierre et de ses habitant-e-s :

La chasse aux précaires et la casse de l’hôpital public continue en toute impunité.

 
 

 

 

Le 6 avril dernier, se tenait le procès d’expulsion du DAL 31, du Centre Solidaire Abbé Pierre, et de plusieurs habitant.e.s, toujours en attente de relogement. Le délibéré paru hier est sans surprise : une expulsion sans délais, prévue pour le 20 mai prochain avec 50 euros d’astreinte par jour de retard, là où la Mairie de Toulouse en avait demandé 500.

Nous rappelons que cette expulsion fait suite à plus de deux ans de négociation entre ces deux associations (le DAL 31 et le Centre Solidaire Abbé Pierre), le CHU et la Mairie de Toulouse, qui s’étaient engagés (courriers, mails et comptes rendus officiels à l’appui) à un relogement de l’association DAL 31 et du Centre Solidaire Abbé Pierre dans l’enceinte de l’Hôpital La Grave, ainsi qu’à trouver une solution de relogement conformes aux habitant-e-s encore sur place. En juin 2020, au moment où les architectes mandatés par la mairie travaillaient déjà avec les deux associations sur les plans du nouveau local proposé par le CHU, le service juridique de la mairie a envoyé sa dernière version de la convention de relogement des deux associations et des habitant-e-s, convention que le DAL31 et le Centre Solidaire Abbé Pierre ont accepté de signer le même jour. Suite à cette réponse rapide et positive de notre part, et malgré nos multiples relances, nous avons depuis ce jour fait face à un silence de plombs inexplicable de la part de la mairie. Ce que nous ne savions pas encore, c’est que pendant que le CHU et la Mairie faisaient mine de chercher un terrain d’entente, ils nous assignaient au tribunal pour nous expulser, sans même nous en informer. 

Pourtant, il y a 10 jours, alors que la Mairie refusait toujours tout échange avec nous depuis juin, elle organisait une réunion inter-associative à notre sujet, sans nous y convier, ni même nous en informer, et encore moins que nous ayons accès à un compte rendu.  Comment ne pas être choqué-e-s par de telles manœuvres, qui de surcroît tente de nous mettre en concurrence et de nous diviser entre associations ? Où est la poursuite du dialogue là-dedans, comme le claironne le communiqué de la Mairie ?

De plus, dans son communiqué du 20 avril, lorsque la Mairie de Toulouse avance qu’il n’y a aucun lien entre la démolition du Pavillon Nanta et le projet immobilier du promoteur Kaufman and Broad, elle omet de dire que ce projet n’aurait jamais vu le jour sans l’accord de Monsieur Moudenc lui-même, qui est à la fois Président du Conseil de Surveillance du CHU (instance décisionnaire du CHU), mais également responsable du PLU qui autorise ce projet immobilier. Comment est-il possible de ne pas prendre en compte les effets de « gentrification » qu’engendre un tel projet, totalement incompatible avec la présence voisine de personnes précaires qu’il faut écarter au plus vite alors que le chantier de Kauffman est si bien avancé ?  Et comment peut-il oublier qu’il a permis de ce fait, la destruction d’un hôpital public en pleine crise sanitaire ?

Quand la Mairie de Toulouse se targue de créer « un cheminement paysager  » à la place du pavillon Nanta, « rendant ainsi possible l’ouverture au public du dôme de La Grave », de quel public parle-t-elle ? De quel.le.s Toulousain-e-s parle-t-elle quand elle prétend leur « rendre » cet espace ?

  • Certainement pas les personnes précaires contre lesquelles elle mène une politique stigmatisante et d’acharnement depuis des années !
  • Certainement pas les 25 familles sans-logis qui étaient initialement présentes à l’ouverture du Pavillon Nanta en 2017, et qui ont peu à peu été relogées, non pas par les efforts de la municipalité comme elle le laisse parfois entendre, mais grâce à la persévérance des familles elles-mêmes, abandonnées par les pouvoirs publics, ainsi qu’au travail du DAL 31.
  • Certainement pas les familles qui ne sont toujours pas relogées et qui sont aujourd’hui expulsées sans solution, en pleine crise sanitaire et en pleine trêve hivernale.

La municipalité oublie également de préciser que ce cheminement paysager à la place du pavillon Nanta permet aux habitant-e-s de ces résidences de luxe, construit juste à côté, d’avoir une belle vue dégagée sur la Garonne et le Dôme. C’est un projet d’ensemble, auquel la mairie et le CHU de Toulouse ont donné leur accord, où la coulée verte et les résidences de luxe de Kaufman and Broad ne peuvent pas être désolidarisées.

Car oui, le pavillon Nanta était bien l’un de ces rares lieux de la ville (comme notamment le Mix’Art Myrys, ou le Bleu Bleu) encore ouverts à toutes et tous, sans condition, et sans jugement de valeurs. Un lieu où l’on valorisait l’humain, un lieu qui cherchait à réunir plutôt qu’opposer. Un lieu où beaucoup d’énergies et de bonnes volontés se retrouvaient pour construire la ville que chacun.e souhaitait. Et depuis l’ouverture du Pavillon Nanta en 2017, le DAL 31 a été moteur dans la construction de cet espace de solidarité et d’aide concrète.

Le DAL 31, c’est une équipe de 4 femmes salariées, d’un-e service civique, de plusieurs stagiaires et de très nombreux-euses bénévoles et sympathisant-e-s qui travaillent sans relâche du lundi au dimanche pour permettre l’accès aux droits à des personnes sans-logis et mal-logées.

Le DAL 31, ce sont des permanences qui ne désengorgent malheureusement pas face une crise du logement, mais dont les résultats en terme de victoires juridiques et de relogements ont poussé la Fondation Abbé Pierre et La Région Occitanie à renouveler leurs subventions.

Le DAL 31, c’est une association qui s’active chaque jour au côté des personnes sans logis et mal logé-e-s pour pallier une défaillance institutionnelle et faire respecter l’application du droit par ces institutions. Et ce dans un contexte où il y a des milliers sans-abris à Toulouse et un manque criant de logements sociaux. Mais aussi des familles qui vivent en sur-occupation, dans l’insalubrité, dans l’insécurité ou encore qui risquent de se faire expulser car elles ne parviennent plus à s’acquitter du loyer.

Le DAL 31, ce sont des assemblées de toulousain-e-s mal logé-e-s et sans logis qui se réunissent pour discuter, regagner en dignité, reprendre confiance et agir sur leurs problèmes de logement. Et parfois aussi partager un grand moment de convivialité tous ensemble, par exemple au moment de Noël.

Le DAL 31, c’est une expertise dans les quartiers et un travail de fond de collecte et d’analyse de données avec la production de rapports sur le logement salué par la Région Occitanie et repris par de nombreux acteurs.

Et non, le DAL 31 n’est pas une association d’extrême-gauche dont le but ne serait que de diffuser des « propos mensongers » sur la politique de la Mairie de Toulouse. L’objectif du DAL est simple, il est celui de la défense d’un droit fondamental : la dignité humaine. Comment vivre dignement sans logement décent ? La Mairie de Toulouse oublie bien trop souvent la défense de ce droit auquel elle semble lui préférer le confort des « promeneurs du bord de Garonne », cherchant une fois de plus à diviser les toulousain-e-s.

La Mairie de Toulouse s ‘évertue à nous faire passer pour des agitateurs, pour mieux éluder le rôle que nous jouons sur le territoire et auprès des populations sans et mal-logées. Un discours réducteur qui de plus jette le discrédit sur notre association, ainsi que par ricochet sur les 120 associations partenaires cosignataires de notre lettre ouverte à destination de la Mairie de Toulouse. Lettre ouverte qui demandait une réunion à laquelle nous devions assister et à la reprise du dialogue rompu par la municipalité juste après sa réélection fin juin.

Aussi nous invitons la Mairie de Toulouse à venir dans les permanences du DAL31, pour rencontrer ses salariées, ses bénévoles, ses stagiaires, les toulousain-e-s mal logées et sans logis qui se battent quotidiennement pour le droit de vivre dignement et qui ont toute leur place dans notre ville.

Malgré cette expulsion, la réquisition du DAL31 que nous avions nommée « Réquisition Abbé Pierre » aura tenu son rôle en relogeant une vingtaine de familles et de personnes depuis que nous l’avons ouverte en 2017. Pour ces familles et nous, c’est en soi une victoire !

Elle nous aura permis de bénéficier de locaux pour nous réunir, travailler, accueillir.

Locaux dont nous sommes expulsés aujourd’hui.

Cette expulsion ne signe pas l’arrêt de nos luttes. De nouvelles réquisitions ont déjà lieu et naîtrons dans le futur pour faire respecter le Droit au Logement (notamment porté par la loi DALO de 2007).

Nous ne lâcherons rien tant que l’ensemble des mal-logé-e-s et sans logis n’auront pas un toit digne et pérenne. Tant que les pouvoirs publics ne feront pas correctement leur travail.

 

 

Plus que jamais le DAL lance un cri d’alerte sur les politiques désastreuses de la mairie et de la préfecture !

La lutte continue !

 

Un toit c’est un droit !